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Les charmes du système de milice dans la gestion des caisses de pensions sont-ils désuets?

La BCV a réuni plusieurs experts en Loi sur la prévoyance professionnelle (LPP) pour une table ronde sur le thème de l’avenir du deuxième pilier à l’heure de «Prévoyance vieillesse 2020». Un tour d’horizon au cours duquel a notamment été abordé le débat en cours sur la professionnalisation croissante des caisses.

Le système de milice dans la gestion des caisses de pensions se justifie-t-il encore? Récurrente au vu de la complexification croissante de la tâche, la question refait surface en marge du débat sur la réforme du système suisse des retraites «Prévoyance vieillesse 2020». Et en raison de la quête de rendement, toujours plus difficile, en cette période de taux bas et de croissance molle.

«Dans les années 80-90, il suffisait d’acheter des obligations de la Confédération pour assurer un rendement de 4% ou 5%. Aujourd’hui, ces mêmes titres ne rapportent plus grand-chose», a ainsi cadré Olivier Kern, expert agréé LPP, directeur chez Pittet Associés AG, lors d’une table ronde organisée par la BCV*. Autre changement: toujours dans les années 80, l’espérance de vie à 65 ans était de 14,3 ans pour les hommes et 18,2 ans pour les femmes. Aujourd’hui, elle est de 19,4 et 22,4 ans, selon les données de l’OFS citées à moult reprises lors du débat. A cela s’ajoute l’arrivée massive des baby-boomers à l’âge de la retraite. «Nous avons devant nous 25 années compliquées, la situation devant ensuite se stabiliser», a précisé Fabrice Welsch, directeur du Département Prévoyance et conseils financiers de la BCV. Ces évolutions secouent les deux socles du deuxième pilier: les espérances financières et démographiques. Et se traduisent, notamment, en autant de pression sur le mode de gestion des caisses de pensions, voulu dès ses débuts milicien et paritaire.

Changements de paradigme

Certes, lorsqu’il s’agit de la Loi sur la prévoyance professionnelle (LPP), le long terme prévaut, mais les mutations de cette dernière décennie ont imposé des changements de paradigmes fondamentaux dans le calcul des divers taux de référence qui guident la fixation des rentes, et donc la gestion des caisses, a insisté Fabrice Welsch. A propos du taux de conversion que le Conseil fédéral envisage de baisser de 6,8% à 6%, il a relevé que, indépendamment de l’analyse actuarielle, ce niveau prenait tout son sens sur le plan politique.

Cette évolution radicale du cadre de référence place les conseils de fondation devant des décisions toujours plus ardues. Des exemples issus du débat? Faut-il indexer les rentes à une inflation qui devrait tôt ou tard réapparaître? Doit-on introduire des systèmes plus flexibles avec des adaptations totales ou partielles au gré de l’évolution des prix, de l’espérance de vie, ou des résultats de la caisse? Michèle Mottu Stella, experte agréée LPP, directrice chez Swisscanto Prévoyance SA, s’est alors demandé si tout «conseil de fondation saurait considérer chaque classe de rentiers de manière différenciée et attribuer à chacune une mise à niveau qui corresponde à ce qu’il coûte réellement». Car il sera «impossible de continuer à considérer les rentiers comme un bloc uniforme».

 

 

Il sera impossible de continuer à considérer les rentiers comme un bloc uniforme.
Michèle Mottu Stella, experte agréée LPP, directrice chez Swisscanto Prévoyance SA

La flexibilisation des rentes incarne un de ces éléments de complexification de la gestion des caisses. Ceci au moment même où arrivent à la retraite les pères du deuxième pilier. Cette génération qui a mis le système en place dans les années 80 et l’a réformé dans les années 90. Qui va prendre la succession? Avec quelle formation? Et pour quelle reconnaissance professionnelle et bien sûr pécuniaire?

Plus de responsabilités qu'un conseil d'administration

Et Fabrice Welsch de rappeler que «le Tribunal fédéral a précisé que la responsabilité des membres de l’organe suprême d’une institution de prévoyance allait au-delà de celle d’un membre du conseil d’administration, au vu du caractère social de la prévoyance professionnelle obligatoire et surobligatoire». Dès lors, «y a-t-il indemnité appropriée si elle dépasse celle octroyée aux membres du conseil d’administration de la société fondatrice de l’institution de prévoyance? Et qui décide si une indemnité est appropriée?»

«Quelle que soit la rémunération des membres du conseil de fondation, ce ne sera qu’une goutte d’eau par rapport à l’océan de responsabilités qu’ils endossent», a résumé Emmanuel Vauclair, senior consultant d’Aon Hewitt (Suisse). Pour éveiller des vocations, il croit davantage au rôle que joue la caisse de pensions dans l’entreprise, «un lien, un partenariat social». Or, convient-il, ce lien tend à diminuer en raison, et on y revient, de la complexification des tâches. Ainsi, l’aspect paritaire de la gestion se réduit, constatent nombre d’entreprises, notamment car employeurs et employés se font toujours plus souvent représenter par des experts patronaux ou syndicaux dans les conseils. Autre motif de relâchement de ce lien: la participation à des caisses communes ou collectives et donc l’abandon de la caisse propre à l’entreprise. Notamment pour des raisons de taille critique.

Professionnalisation ou contrôles

Pour l’heure, la balle des vocations est dans le camp politique – conditions-cadres – et des entreprises, qui peuvent valoriser une tâche moins bien mise en valeur que celle du conseil d’administration par exemple. Pour ce faire, il s’agit notamment de «remettre le curseur au bon endroit», a souligné Michèle Mottu Stella. «La responsabilité des membres du conseil de fondation s’arrête à appliquer les bonnes pratiques». Qui dit bonnes pratiques, dit par exemple, ne pas déléguer des tâches inaliénables à l’instar des contrôles. Or, pour les PME, ces activités sont autant de travail supplémentaire bénévole et de risques à prendre.

La solution passe-t-elle par une superposition de niveaux de contrôle ou par une plus grande professionnalisation du secteur? Doit-on se résoudre à abandonner ce qui a fait le succès du deuxième pilier, son charme aussi? La baisse constante du nombre de caisses est une réponse indirecte à une évolution vers la professionnalisation que certains jugent inéluctable, mais difficile à entériner politiquement. Au contraire des contrôles. Les adeptes du système de milice tiennent, eux, avant tout à l’aspect paritaire de la gestion, tout en convenant que les experts sont aujourd’hui indispensables et que les conseils de fondation doivent pouvoir bénéficier de compétences externes solides. Aux caisses alors de les payer, a conseillé Emmanuel Vauclair, «c’est dans leur intérêt à long terme».

En attendant toute modification structurelle de la gestion des caisses de pensions ou l’entrée en vigueur de la réforme «Prévoyance vieillesse 2020», les conseils doivent procéder urgemment, ont conclu les intervenants, à une réflexion sur leurs priorités. A eux, d’identifier les risques à traiter en premier, à l’interne ou à l’externe, selon leur nature.  Car comme l’a rappelé sous forme de boutade Olivier Kern, «en Suisse, il n’est pas interdit de perdre de l’argent, à condition que ce soit fait légalement. Mais il n’est pas interdit non plus d’en gagner».

Si le conseil de fondation est comparé au conseil d’administration, il manque aux caisses un étage de direction.
Fabrice Welsch, directeur du Département Prévoyance et conseils financiers de la BCV

La réflexion entamée autour de la professionnalisation des conseils de fondation bute en fait sur une question de structure, a constaté Fabrice Welsch. Au-delà de la question de la taille minimale nécessaire, «si le conseil de fondation est comparé au conseil d’administration, il manque aux caisses un étage de direction». La solution passerait alors par la mise en place d’une équipe professionnelle en charge de l’opérationnel, laissant au conseil les rênes de la stratégie et de la surveillance. La gestion paritaire et les responsabilités qui lui sont liées, telles que prévues dans la LPP, devraient alors être ajustées.

Où en est-on de «Prévoyance vieillesse 2020»?

Le Conseil des Etats s’est penché sur la réforme du système de retraite «Prévoyance vieillesse 2020» durant sa session de septembre 2015. En ouverture du débat, le Conseiller fédéral en charge du dossier, Alain Berset, a tenu à rappeler qu’«un des objectifs de cette réforme est de maintenir le niveau des prestations de vieillesse». Le suivant est d’«assurer l’équilibre financier du premier pilier et du deuxième pilier de manière à stabiliser la prévoyance vieillesse». Ce ne sont ainsi pas moins de 8,3 milliards de francs qui seront nécessaires d’ici 2030 pour couvrir les besoins de l’AVS.

Le Conseil des Etats a notamment décidé:

  • de porter l’âge de la retraite des femmes à 65 ans en trois ans
  • d’autoriser l’accès aux rentes AVS de manière flexible entre 62 et 70 ans
  • d’augmenter de 70 francs par mois les rentes individuelles AVS et de 226 francs celles de couple
  • d’abaisser le taux de conversion du deuxième pilier de 6,8% à 6%
  • de réévaluer le barème des bonifications de vieillesse LPP (5% à parts égales entre 21 et 24 ans, 7% entre 25 et 34 ans, 11% pour les 35-44 ans, 16% pour 45-54 ans, et 18% dès 55 ans)
  • d’augmenter de 1% la TVA pour financer l’AVS
  • d’augmenter de 0,3% les cotisations salariales et patronales pour l’AVS
  • d’augmenter à 8,1% les cotisations des indépendants à l’AVS

Au final, le projet a été approuvé par 28 voix contre 5 et 10 abstentions.

Le Conseil national s’emparera du dossier en septembre 2016 et le peuple devrait se prononcer d’ici fin 2017. Initialement, l’entrée en vigueur de la réforme des retraites est attendue pour 2018.

*Table ronde

Table ronde sur le thème de la prévoyance professionnelle organisée par le Département Asset Management de la BCV et qui a réuni le 3 septembre à Neuchâtel:

  • Fabrice Welsch, directeur du Département Prévoyance et des conseils financiers à la BCV, modérateur
  • Olivier Kern, directeur, expert agréé LPP, Pittet Associates AG
  • Emmanuel Vauclair, senior consultant, Aon Hewitt (Suisse)
  • Michèle Mottu Stella, directrice, experte agréée LPP, Swisscanto Prévoyance SA