La dynamique du marché immobilier devrait notamment être tempérée par la dégradation de la conjoncture et la remontée des taux d’intérêt.
Malgré la baisse des perspectives de croissance et la remontée des taux d’intérêt, les prix de l’immobilier vaudois poursuivent leur hausse. Le rythme est resté soutenu au premier semestre, avec une progression de 4,9% pour les maisons individuelles et de 3,4% pour les appartements en PPE. Si la demande reste au rendez-vous, la dynamique devrait notamment être tempérée par la dégradation de la conjoncture.
Après une forte reprise économique en 2021, les perspectives conjoncturelles se sont sensiblement détériorées depuis le début de l’année en raison de la situation géopolitique internationale, du retour de l’inflation, de la remontée des taux d’intérêt et des tensions sur l’approvisionnement énergétique. L'économie mondiale ralentit et, entre janvier et octobre, le Fonds monétaire international (FMI) a abaissé ses prévisions de croissance pour cette dernière de plus d’un point de pourcentage, à 3,2% pour 2022 et 2,7% pour 2023. Les prévisions pour le canton de Vaud de l’Institut CREA ont évolué dans la même direction: à 2,5% pour cette année et 1,4% pour l’an prochain, elles sont de respectivement un point et un demi-point de pourcentage plus basses qu’en janvier. Le Secrétariat d’État à l’économie a aussi abaissé ses prévisions pour l’ensemble du pays.
Malgré les vents contraires et un degré d’incertitude très élevé, l’économie vaudoise se montre robuste. Les indicateurs de la Commission Conjoncture vaudoise sont en territoire positif dans toutes les branches, en particulier celles qui sont tournées vers la clientèle domestique. À 3,1% en octobre, le taux de chômage s’inscrit à l’un de ses plus bas niveaux depuis deux décennies. Une telle résistance dans un environnement conjoncturel mondial troublé s’observe depuis le début du siècle et résulte notamment de la diversification de l’économie vaudoise dans des domaines à haute valeur ajoutée.
Dans ce contexte contrasté, les prix de l’immobilier en propriété individuelle ont poursuivi leur hausse, alors qu’ils s’inscrivent déjà à un niveau historiquement élevé. Au premier semestre 2022, les maisons familiales individuelles ont augmenté de 4,9% et les appartements en propriété par étages (PPE) de 3,4%. L’augmentation des prix des villas est particulièrement soutenue depuis 2020 et le début de la crise du COVID-19. Cependant, pour ces dernières comme pour les PPE, les progressions étaient en retrait par rapport aux hausses record de certaines années entre 2005 et 2015.
Les taux bas, les obstacles au voyage et le développement du télétravail ont contribué à renforcer la demande pour l’immobilier en propriété, notamment les maisons individuelles dans des zones périurbaines. De plus, la démographie reste dynamique, avec une hausse de la population vaudoise de 1,2% en rythme annuel au deuxième trimestre. Face à cela, la production a fléchi dans le canton, d’un peu plus de 5 000 nouveaux logements à un peu plus de 4 000. Les maisons individuelles représentent moins d’un dixième de l’offre de nouveaux logements, les PPE environ un tiers et près de six nouveaux logements sur dix sont destinés à la location. Le taux de vacance dans le canton a diminué, une première depuis 2009: il est passé de 1,3% en 2021 à 1,1% en 2022. Quant aux loyers offerts sur le marché, après une baisse de quelque 22% depuis leur pic en 2014, ils sont remontés de 0,6% au premier semestre.
Corollaire du retour de l’inflation: les taux d’intérêt remontent. Avec un renchérissement de 3,0% en octobre, la Suisse est moins concernée que d’autres pays, grâce notamment à la force du franc. Alors qu’il s’inscrivait à -0,1% à fin 2021, le rendement des obligations à 10 ans de la Confédération oscille depuis le début de l’automne entre 0,9% et 1,4%. Les taux courts sont revenus en territoire positif après une remontée du taux directeur de la BNS, qui est passé en moins de quatre mois de -0,75% à 0,50%. Par conséquent, les taux hypothécaires pour les nouvelles affaires ont également augmenté (lire en p. 6).
La hausse des prix concerne également les matériaux de construction. Au premier semestre, ils ont augmenté de 10,7%, en raison notamment du renchérissement des produits métalliques et de l’énergie, selon l’Office fédéral de la statistique. À cela s’ajoutent dans certains cas des difficultés d’approvisionnement et des retards de livraison, liés à la perturbation des chaînes logistiques.
Malgré leur hausse récente, les taux hypothécaires sont toujours relativement peu élevés en comparaison historique. En revanche, en réponse à une forte demande, une remontée de la construction d’objets en propriété individuelle se dessine, permettant à la production globale de revenir à environ 5 000 nouveaux logements l’an prochain. La hausse des prix de l’immobilier en propriété individuelle devrait progressivement ralentir. Dans l’immobilier de rendement, la hausse des rendements obligataires tempère la demande des investisseurs. Enfin, les surfaces commerciales restent soumises aux conséquences socioéconomiques de la crise sanitaire, comme le développement du télétravail et du commerce en ligne.