Jean-Christophe Zufferey, CEO et fondateur de SenseFly, entreprise en forte croissance dédiée à la conception de drones.

DANS LE CANTON 10 août 2016

Scale-Up Vaud, un label attendu

Ce ne sont plus tout fait des start-up, mais pas non plus des entreprises au sens classique du terme: les scale-up bénéficient désormais d’un label spécifique, lancé ce mardi 14 juin par Innovaud. L’initiative doit permettre de favoriser la promotion et de soutenir la croissance de ces entreprises… Afin qu’elles se développent en Suisse, sans se relocaliser ailleurs.

Qu’est-ce qu’une scale-up? Innovaud a défini les critères qui réunissent ces sociétés très spécifiques: un minimum de dix employés, un taux de croissance de 20% annuel sur trois années consécutives et une ambition «globale», explique Rémi Walbaum, le président d’Innovaud, plate-forme de l’Etat de Vaud pour la promotion de l’innovation dans le canton.

«Ces entreprises sont moteurs de création de valeur et d’emploi. Ce ne sont plus des start-up, mais des sociétés en train de décoller, une véritable chance pour le canton», affirme Rémi Walbaum. Actuellement, Innovaud a déjà identifié dix entreprises répondant à cette définition. Parmi elles, Sophia Genetics, NetGuardians, SenseFly, Abionic, Atracsys, Elite… «A elles seules, elles représentaient 395 emplois à fin 2015 et en ont déjà créé 90 depuis.»

Des besoins spécifiques

Les scale-up représentent donc un enjeu économique non négligeable. De plus, elles ont des besoins très spécifiques, différents de ceux d’une start-up. «Une start-up recherche du financement, doit souvent réussir à valider un premier prototype, conquérir son marché et obtenir de solides références de clients», résume Patrick Barbey, à la tête d’Innovaud. «Les scale-up ont d’autres questionnements: comment attirer des talents, s’internationaliser, gérer leur croissance, trouver un hébergement… Elles ont trouvé leur business model mais doivent désormais le faire grandir», explique le spécialiste de l’innovation. A noter que ce développement doit souvent s’effectuer très rapidement: «dans des marchés à forte croissance, il est important de rester un acteur-clé. Croître vite est une exigence, sinon on disparaît très vite», assure Rémi Walbaum.

Promouvoir et réunir

Le label lancé par Innovaud soutient ces entreprises «qui peuvent être d’anciennes start-up, mais aussi des PME en forte croissance», remarque Jean Philippe Lallement, directeur du Parc d’innovation de l’EPFL. Seule exigence pour bénéficier de cette distinction: répondre à la définition de scale-up (voir ci-dessus), être domicilié dans le canton de Vaud et actif dans un domaine technologique ou innovant. «Pour le moment, aucune scale-up contactée n’a refusé d’être membre de notre réseau», explique Patrick Barbey.

Toutes se sont montrées intéressées par l’aide spécifique apportée par Innovaud, qui se décline en quatre aspects. D’abord, la promotion, via notamment un site internet et un fil Twitter dédiés, ensuite un soutien spécifique via des partenaires confirmés comme platinn, Alliance pour innover ou Switzerland Global Enterprise, mais aussi un travail de réunion: des rencontres réservées aux scale-up seront organisées. «Ce réseau est important, il permet de gagner du temps en échangeant avec des collègues qui partagent les mêmes questionnements», remarque Jean-Christophe Zufferey, CEO et fondateur de SenseFly, scale-up active dans le domaine des drones passée de deux salariés en 2009 à 130 aujourd’hui.

Une période propice

Enfin, Innovaud espère réussir à fédérer plusieurs acteurs autour de ce label, notamment des grandes entreprises ou multinationales vaudoises. «En devenant clientes des scale-up vaudoises, elles permettraient de soutenir l’innovation et le tissu économique local», note Patrick Barbey.

L’initiative arrive à point nommé. Un tel label existe déjà au Royaume-Uni et au Danemark et la thématique est actuellement débattue au niveau de l’Union européenne. De plus, l’écosystème du canton de Vaud est aujourd’hui mature, tant en nombre de start-up créées que de prix remportés ou de fonds levés. Si beaucoup de soutiens existent pour les start-up en création, le vide est quasi-total pour celles qui grandissent vite. De plus, les projecteurs sont aujourd’hui braqués sur les entreprises à forte croissance, qui deviennent des actifs recherchés par les investisseurs «à une époque où l’on recherche du rendement et où de grandes sociétés sont intéressées par des rachats», note Jean-Philippe Lallement.

Faciliter le recrutement

Les scale-up elles-mêmes ont besoin de clarifier leur positionnement auprès de leurs partenaires et même de leurs employés. «Au départ, le label start-up est sympathique, mais après quelques années il peut avoir une connotation négative. Le label scale-up nous permet de nous identifier à une société en croissance, plus mature. C’est important notamment dans le recrutement. Nous avons parfois du mal à attirer des salariés séniors qui ont une expérience et une envie de management. Lorsqu’on est identifiés scale-up, ils viennent vers nous plus facilement», explique Nicolas Durand, CEO et fondateur d’Abionic. Cette entreprise de 16 employés, active dans le diagnostic médical, a prouvé sa technologie, certifié son produit et validé son premier marché. Après avoir levé 11,5 millions de francs au total, elle cherche désormais à industrialiser sa production et à grandir rapidement.

A terme, le label doit permettre un ancrage vaudois des sociétés à forte croissance, et, pourquoi pas, le positionnement du canton dans le top 20 des hot spots de l’innovation au niveau mondial. D’ici la fin de l’année, une demi-douzaine d’autres entreprises pourraient être labellisées scale-up par Innovaud, dont la très prometteuse NanoLive.

Innovaud aide les start-up et PME innovantes vaudoises en les mettant rapidement en relation avec les bons interlocuteurs si elles ont besoin d'hébergement, de financement et/ou de coaching. Par le biais d’Innovaud, elles ont notamment accès à la Fondation pour l’innovation technologique (FIT), organisme soutenu par la BCV à hauteur de 500 000 francs par an, qui propose des aides financières à des projets à caractère technologique et innovant.

Ce texte est paru sur bcv.ch le 14 juin 2016.

Camille Andres, rédactrice, pour la BCV