De 7% à fin 2021, l’inflation américaine devrait refluer, mais elle demeurera au-dessus des objectifs de la Fed, qui s’avoue désormais inquiète.

MARCHÉS 1 février 2022
Mots-clés:

Les taux, le retour

  • Inquiète de l’évolution des prix, la Fed dit vouloir bientôt relever ses taux.
  • En Europe, si les taux longs réagissent, les taux courts resteront au plancher cette année. 

Après l’année de l’inflation, l’année des taux. Alors que la hausse des prix s’incruste dans le quotidien des Américains, mais aussi des Européens, les banques centrales adaptent leur discours.

Aux États-Unis, au vu de la forte croissance, d’une inflation persistante, d’un marché de l’emploi solide – le chômage est repassé en fin d’année sous la barre des 4% –, les taux sont trop bas. La Réserve fédérale l’a annoncé: elle cessera en mars ses injections nettes de liquidités avant de relever ses taux. Elle devrait procéder à trois hausses dès ce printemps et à trois autres l’an prochain. Son président, Jerome Powell, ne l’a en outre pas caché, la Fed pourrait réduire son bilan en remettant des créances sur le marché, se lançant ainsi, après une longue période d’assouplissement quantitatif, dans un resserrement quantitatif.

Au gré de l’inflation

L’évolution de l’inflation sera décisive dans le rythme d’intervention de la Banque centrale qui reste derrière la courbe des taux, pour reprendre cette expression souvent utilisée pour exprimer l’écart entre sa politique et la situation économique. Si certains éléments non récurrents doivent alléger la pression sur les prix dans la deuxième partie de l’année, d’autres sont appelés à demeurer. Ainsi, de 7% à fin 2021, l’inflation américaine devrait refluer, mais elle demeurera au-dessus des objectifs de la Fed, qui s’avoue désormais inquiète. Un dérapage en spirale inflationniste – entraînement incontrôlé à la hausse des salaires et des prix – n’est cependant que peu vraisemblable.

Ce changement de paradigme a soutenu la progression des taux longs sensibles à la conjoncture et aux attentes en matière d’inflation. Si elle est plus marquée sur les bons à 10 ans du Trésor américain, elle se lit aussi de ce côté-ci de l’Atlantique. Ainsi, pour prendre un exemple, les rendements des obligations à 10 ans de la Confédération ont franchi la barre du 0% début janvier, ce qui n’était plus arrivé depuis 2018.

Taux courts européens au plancher

Sur le front des taux courts, la Banque centrale européenne (BCE) et la Banque nationale suisse (BNS) ne devraient pas intervenir en 2022. L’inflation en Europe est en effet, au contraire de celle américaine, plus temporaire que pérenne. Les prix s’installeront cependant à des niveaux supérieurs à ceux enregistrés avant la crise sanitaire. Qu’adviendra-t-il en 2023? Si jusqu’à la fin de l’an dernier, toute intervention de la BCE et de la BNS semblait clairement exclue, la probabilité d’une normalisation des taux courts européens s’accroît pour l’an prochain.

À la suite de ce changement de régime monétaire, les marchés consolident sans entrer, pour l’instant, dans une spirale négative. Il reste ainsi acceptable tant que les taux restent bas. Ce qui devrait encore être le cas en 2022. Tant que les taux longs américains, appelés à progresser graduellement, restent aux environs de 2%, la normalisation prévue par la Fed ne risque ainsi pas d’entraver exagérément l’activité. Mais une inflation plus importante ou une croissance moins solide qu’attendu modifierait l’approche de la Banque centrale américaine et avec elle, la perception des investisseurs. Les marchés pourraient ainsi connaître une période plus trouble dans les prochains mois.