Comme dans d’autres secteurs d’activité, le modèle qui semble émerger actuellement dans les banques est hybride, un alliage savamment organisé entre l'homme et la machine.

VOTRE ARGENT 19 septembre 2019
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La digitalisation doit aussi avoir un visage

Pour les acteurs bancaires bien ancrés dans leur région, le private banking doit relever le défi d'allier innovation et proximité. Robot ou conseiller, l’heure est aux solutions hybrides.

Digitalisation et proximité sont-elles compatibles? Pour les acteurs bancaires bien ancrés dans leur région, la question est cruciale, car ils revendiquent leur proximité avec une clientèle désormais rodée à jongler avec différents types de services bancaires et différents canaux d’accès à ces mêmes services. La digitalisation enrichit l’interaction entre le client et sa banque, la personnalise, la rend plus accessible, plus immédiate. L’homme et la machine sont complémentaires: une offre digitale doit avoir un visage. Les défis de la digitalisation pour la banque de proximité sont ailleurs. Innover pour créer de la valeur avec le digital et assurer la sécurité bien sûr, mais pas seulement. Le défi est aussi de proposer une expérience au client qui préserve cet actif essentiel qu’est la notion de confiance.

La gestion de fortune n’échappe pas aux grandes tendances de la digitalisation de l’économie. Dans la banque, l’innovation est nourrie par trois moteurs puissants que sont la densification de la réglementation, l’évolution de la technologie, ainsi que, et surtout, le comportement de la clientèle. Car s’il est un secteur dans lequel la qualité de service devrait valoir plus qu’une commodité, c’est bien le monde bancaire.

Une offre enrichie

Comme dans d’autres secteurs d’activité, le client a perçu le virage digital dans la multiplication des canaux de contact. Il a aussi découvert de nouveaux acteurs ‑ notamment des start-up financières, des fintech. Il a eu accès à de nouveaux services, à de nouvelles offres. Des algorithmes lui proposent des solutions de placements low cost relativement performantes. D’autres le poussent à s’intéresser à des actifs de niches qu’il croyait réservés à une clientèle plus institutionnelle ou plus aguerrie. Il croule également sous la démultiplication des sources d’informations. L’offre s’enrichit. Au détriment ou à l’avantage de son portefeuille? Il veut le savoir et le comprendre.

Les études de marché le démontrent, une majorité de clients Private Banking tiennent tout autant à pouvoir s’informer et investir en ligne qu’à discuter avec leur conseiller des effets d’une décision sur leur patrimoine. Que ce soit aux États-Unis ou en Suisse, les chiffres indiquent la même tendance: si la part de la fortune déléguée à la gestion des seules machines s’accroît, elle reste largement inférieure à celle gérée par les acteurs bancaires plus traditionnels.

Un service personnalisé

La demande a suivi le marché. Pour rester fidèle à sa banque, le client attend non seulement de la performance, mais aussi de l’écoute et du conseil. Pour les banques de proximité qui disposent d’un fort réseau, la réponse passe par une offre qui tend à être à la fois plus homogène – afin qu’elle soit identique sur tous les canaux de distribution – et plus personnalisée. Là encore, la contradiction n’est qu’apparente. L’homogénéisation renforce la crédibilité et la valeur d’une offre qui doit s’adapter aux différents profils de la clientèle. Pour que son client apprécie à sa juste valeur son expérience, la banque se doit de s’assurer de l’accessibilité et de l’intelligibilité de ses propositions.

Solution hybride

Le défi réside dans l’équilibre à trouver entre une offre de banque universelle et cette tendance à la customisation dans un environnement fortement concurrentiel qui voit arriver de nouveaux acteurs. Comme dans d’autres secteurs d’activité, le modèle qui semble émerger actuellement est hybride. Certains canaux de distribution et services sont digitalisés avec, pour finalité essentielle, d’enrichir la relation entre le client et la banque. Une offre disponible partout et en tout temps entourée d’un service personnel qui implique pour la banque une excellente connaissance de sa clientèle. De ce qu’elle attend comme valeur ajoutée.

Cette nouvelle donne influe évidemment sur la relation entre la banque et son client. Cette relation doit être plus efficiente, plus transparente, plus personnelle. Et ceci non seulement en matière de coûts, mais à propos du degré de sophistication de l’offre ou encore du niveau de service désiré. Des contrats sont le plus souvent proposés donnant au client accès à une offre spécifique qui corresponde à son profil d’investisseur. Il définit ses objectifs et la manière d’y arriver. Il sait désormais ce qu’il paie et pourquoi. Mais surtout ce qu’il peut attendre en matière d’accompagnement. Il veut participer aux décisions? Il veut déléguer? Il veut du tout automatique?

Le rôle du client – comme d’ailleurs le rôle de son conseiller – s’est déplacé sur la chaîne de valeur de la gestion de fortune. Et se déplaceront encore. L’intelligence artificielle n’a ainsi encore qu’effleuré le monde du conseil patrimonial. Le curseur de la confiance est appelé à se mouvoir à son tour au fur et à mesure que la machine appartiendra au quotidien du client et au gré des cycles économiques. Dans l’univers de la gestion du patrimoine, le positionnement de ce curseur est néanmoins appelé à préserver à l’humain une place de choix à condition qu’il s’adapte. Digitalisé, le Private Banking gardera un visage.

Démocratisation et explications

Comment appréhender cette nouvelle offre? Si certains clients accordent d’emblée leur confiance à la seule machine, capable de traiter des milliards d’informations sans sentiment, d’autres sont pris de vertige. Ils se retrouvent à la foi face à une apparente démocratisation de l’offre – ils peuvent avoir accès à des produits qu’ils croyaient réservés à d’autres – mais aussi face à sa sophistication. Elle peut ainsi apparaître difficile à comprendre tant au niveau de son contenu – nature du produit – qu’au niveau de la technologie qui la véhicule – accès à la plateforme. Ces clients ont ainsi besoin du savoir-faire de leur partenaire bancaire pour les accompagner dans leur décision et dans la complexification du monde financier. Une vague de fond se répand: l’offre didactique. Elle vient expliquer non seulement les produits et l’évolution de la réglementation, mais aussi de l’environnement économique et financier et leurs effets sur les portefeuilles.

 

Article paru dans la Neue Zürcher Zeitung, le 12 septembre 2019

Lire l'article de la  NZZ (en allemand)

 

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